Comment suivre ma charge de travail ?

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Comment suivre ma charge de travail ?

Le suivi de la charge de travail : obligation légale d’une charge de travail raisonnable

 

Rappel : l’accord collectif relatif aux forfaits jours doit prévoir les modalités d’évaluation et de suivi régulier par l’employeur de la charge de travail des salarié·es. C’est une condition de validité de l’accord. Cependant, si l’accord ne prévoit rien sur ce sujet ou prévoit un dispositif insuffisant, la convention de forfait individuelle sera valable si l’employeur s’assure que la charge de travail du/de la salarié·e est compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires. Dans le cas contraire, la convention individuelle sera nulle.

De manière générale, l’employeur doit s’assurer régulièrement que la charge de travail du/de la salarié·e en forfait jours est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail (C. trav., art. L.3121-60).

L’obligation de suivre la charge de travail pèse donc sur l’employeur. Cependant, il est utile de pouvoir mesurer sa propre charge de travail pour s’assurer du respect de cette obligation et pour préserver le respect de son droit au repos et à la santé qui sont des exigences constitutionnelles.

 

Il convient de faire la différence entre le respect des temps de repos et la charge de travail.

  • Par exemple, si vous bénéficiez de vos temps de repos quotidien (11 heures) et hebdomadaire (35 heures), il est aussi nécessaire que l’amplitude de votre journée de travail reste raisonnable.

Ainsi, même si la durée maximale de travail ne s’applique pas aux salarié es en forfait jours, la protection de la santé exige que l’amplitude des journées de travail ne soit pas excessive.

Il y a donc un lien direct entre la charge de travail et le temps de travail qui en dépend, mais une charge raisonnable de travail ne se limite pas à la seule durée raisonnable de travail.

 

Le suivi de la charge de travail : qu’est-ce que la charge de travail ?

Il n’existe pas de définition légale de la charge de travail. L’approche que l’on conseillera est une approche globale qui prend en compte :

  • l’ensemble des tâches à réaliser
  • Les effets de ces tâches sur sa santé physique et mentale (fatigue, accident, stress, tensions sociales, etc.)
  • Les conditions de travail (organisation de l’entreprise, du service, de l’équipe ; matériel mis à disposition et leur efficacité, risques identifiés par l’employeur, effectifs suffisants pour la réalisation d’un travail de qualité, injonctions cohérentes, etc.)
  • Le contexte dans lequel le travail est exercé (restructuration, conflits sociaux, contexte économique compliqué, variation des effectifs, cycles de travail, etc.).

 

Tous ces éléments sont des indicateurs qui peuvent orienter l’appréciation de sa charge de travail afin d’estimer si elle est excessive ou déraisonnable.

L’INRS (Institut national de recherche et de sécurité) identifie l’intensité du travail comme un facteur de risques psychosociaux. L’intensité englobe les notions “d’exigence psychologique” et “d’effort”, ainsi que “les contraintes de rythme, l’existence d’objectifs irréalistes ou flous, l’exigence de polyvalence non maîtrisée, les instructions contradictoires, les longues journées de travail, le travail en horaires atypiques, l’imprévisibilité des horaires de travail…”

Ces notions peuvent être des indices de surcharge de travail.

La charge de travail est également liée aux fonctions réellement exercées par le/la salarié·e. Ces fonctions doivent être définies et connues. Un cumul de fonctions, même temporaire, qui correspond à deux classifications distinctes est un indice d’une charge de travail déraisonnable. Il est alors vivement recommandé d’interroger par écrit l’employeur sur ses attentes et sur la définition précise du périmètre des fonctions exercées. L’employeur aura obligation d’y répondre (V. par. ex. CA Rouen, 11 janv. 2018, n° 15/05067).

Les éventuels objectifs fixés par l’employeur participent aussi de la charge de travail et doivent être réalistes. Il est donc conseillé de prendre du temps pour apprécier les objectifs proposés ou fixés conjointement avec l’employeur ou, le cas échéant, d’alerter l’employeur ou les représentant·es du personnel ou syndicaux en cas d’objectifs irréalisables fixés par lui.

Le suivi de la charge de travail : quels conseils en cas d’action en justice ? 

Le/la salarié·e qui souhaite voir reconnaître en justice sa situation de surcharge de travail devra saisir le conseil de prud’hommes compétent (C. trav., art. R.1412-1). Il ou elle devra apporter la preuve de ce qu’il allègue (CPC., art. 9 ; C.civ., art 1353).

Il est donc vivement conseillé, afin de les produire en justice le cas échéant, de conserver l’ensemble des éléments qui attestent du travail demandé et effectué. De la même manière, conserver le détail et les indications temporelles de toutes les tâches quotidiennes, à savoir leur nature, leur volume et leur incidence sur les horaires (V. par. ex. CA Paris, 20 mars 2018, n° 16/04569).

Enfin, la fiche de poste, le compte rendu de l’entretien périodique sur la charge de travail ou de l’entretien annuel d’évaluation et le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP), sont autant d’éléments auxquels le ou la salarié·e peut se référer pour prouver une surcharge de travail (V. par. ex. CA Versailles, 31 janv. 2018, n° 15/04838).

 

Le suivi de la charge de travail : quel est le rôle du CSE concernant la charge de travail ?

Rappel : le CSE, depuis la fusion des instances (CE, CHSCT, DP) détient une attribution en matière de santé-sécurité et conditions de travail. Dans les entreprises de moins de 50 salarié·es, il peut promouvoir la santé, la sécurité et l’amélioration des conditions de travail. Dans celles de 50 salarié·es et plus, il peut procéder à l’analyse des risques professionnels auxquels peuvent être exposé es les travailleurs·ses (C. trav., art. L.2312-5 al 2 ; C. trav., art. L.2312-9).

Dans les entreprises de 50 salarié·es et plus, le CSE procède à intervalles réguliers à des inspections en matière de santé, sécurité et conditions de travail (C. trav. art. L.2312-13). Àcette occasion, les élu·es du personnel peuvent prendre contact avec les salarié·es en forfait jours pour éventuellement s’assurer d’une charge de travail raisonnable.

Les salarié·es en forfait jours peuvent de leur propre initiative contacter les membres du CSE ou de la Commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) lorsqu’elle existe afin de leur faire part d’une surcharge de travail. Ils pourront utilement relayer le risque auprès de l’employeur.

Les élu·es du CSE disposent d’ailleurs d’un droit d’alerte en cas d’atteinte à la santé physique et mentale des travailleurs·ses (C. trav., art. L.2312-59).

 

Le suivi de la charge de travail : les obligations de l’employeur 

Rappel : le droit au repos et à la santé sont des exigences constitutionnelles (Cass. soc., 13 juin 2012, n° 11-10.854 Cass. soc., 26 sept. 2012, n° 11-14.540, n° 1927 FS – P + B).

C’est pourquoi l’employeur doit s’assurer régulièrement que la charge de travail du ou de la salarié·e en forfait jours est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail (C. trav., art. L.3121-60).

C’est une obligation d’ordre public. L’employeur doit pouvoir remédier en temps utile à une charge incompatible avec une durée raisonnable de travail (Cass. soc., 17 janv. 2018, n° 16-15.124).

  • Par exemple, si l’accord collectif relatif aux forfaits jours prévoit comme modalité de suivi de la charge de travail un système d’états autodéclaratifs, il faut que le supérieur hiérarchique du/de la salarié e en assure un suivi effectif et régulier qui permet à l’employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable ( soc., 5 oct. 2017, n° 16-23.106 ; CA Versailles, 3 juill. 2019, n° 17/00622).

L’employeur doit avoir un rôle actif dans l’évaluation et le suivi de la charge de travail. Il doit s’assurer que l’amplitude et la charge de travail du/de la salarié·e restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé·e (Cass. soc., 17 janv. 2018, n° 16-15.124).

 

Il est donc nécessaire que l’accord collectif relatif aux forfaits jours ou, à défaut, l’employeur de manière unilatérale, mette en place un dispositif efficace et régulier de décompte du temps de travail ainsi que des moyens rapides pour remédier à toute situation de surcharge de travail.

  • Par exemple, un seul bilan annuel de la charge de travail afin de s’assurer qu’elle permet une durée de travail raisonnable n’est pas suffisant ( soc., 10 mars 2021, n° 19-17.672 ; Cass. soc., 10 mars 2021, n° 20-11.888 ; Cass. soc., 30 sept. 2020, n° 18-24.956).

Il faut une périodicité utile qui permet de réagir rapidement.

  • Par exemple, un état récapitulatif tous les deux mois ne répond pas non plus à cette exigence ( soc., 5 oct. 2017, n° 16-23.106).

Enfin, les mécanismes de suivi ne doivent pas dépendre exclusivement de l’initiative du/de la salarié·e. C’est à l’employeur de veiller à ce que la charge de travail reste raisonnable. Ainsi, il appartient au/à la supérieur·e hiérarchique, éventuellement au DRH ou à l’employeur directement, d’identifier les situations pour les faire cesser.

 

Propositions de l’Ugict-CGT

 

En cas de déclenchement du dispositif d’alerte, le/la salarié.e doit avoir la possibilité de demander le décompte horaire sur une période de 3 ou 6 mois. Ceci afin, en cas de mesures insuffisantes ou inefficaces :

  • de mettre en évidence la nécessité de revoir l’organisation du travail pour remédier à la charge et à la durée réelle de travail
  • D’éviter que le/la salarié.e soit lésé.e sur sa rémunération.
Cette page a été mise à jour le 17 juillet 2023

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